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Crise alimentaire et nutritionnelle au Sahel : près d’un million de personnes menacées au Tchad

La bande sahélienne traverse le centre du Tchad, parcourant une dizaine de régions qui, chaque année, sont frappées par des graves crises alimentaires et nutritionnelles. La sévérité de la crise, mais aussi son caractère structurel amènent à repenser les bases des interventions. 86% des ménages dans le Wayi et 71% des ménages dans le Batha sont en situation d’insécurité alimentaire. 70% des ménages du Wayi ont perdu une importante partie de leur bétail. Dans le Batha, la production céréalière a diminué de 9,4% en 2017-2018 par rapport à la moyenne des 5 dernières années.

La faiblesse des moyens d’existence met en péril la sécurité alimentaire des communautés

Dans la région du Batha, en plein cœur du Tchad, les ouadis se remplissent au gré des pluies et les agriculteurs retournent aux champs pour préparer les semis en espérant que la récolte à venir sera meilleure que la précédente. Depuis le mois de juin, les communautés vivant dans la bande sahélienne du Tchad traversent la période de soudure, particulièrement précoce et difficile cette année au vu des faibles récoltes et des pertes de bétail importantes au cours de l’année 2017. Les impacts des pluies faibles et irrégulières sur l’agriculture et l’élevage se font aujourd’hui ressentir : la production céréalière a diminué et le déficit fourrager et le tarissement des mares ont forcé les éleveurs à avancer leur départ en transhumance. Or, dans la bande sahélienne, l’agriculture et l’élevage constituent les principales sources de revenu et d’alimentation des familles ; revenus qui deviennent de plus en plus instables et imprévisibles avec le changement climatique qui se traduit dans ces régions par une désertification rapide et la récurrence d’évènements climatiques extrêmes. En l’absence d’opportunités, les familles dans le besoin sont souvent amenées à adopter des stratégies de survies néfastes pour l’avenir. Nombreux sont les chefs de familles contraints de vendre à perte une partie de leur bétail, d’ordinaire pourtant source importante de revenu, alors que d’autres réduisent leurs dépenses de santé, d’éducation ou diminuent leur nombre de repas.

Agir rapidement pour éviter le pire

Selon une enquête menée en mai 2018, 61,6% des ménages de la bande sahélienne seraient en situation d’insécurité alimentaire. Si rien n’est fait pour venir en aide à ces populations, leur situation pourrait se dégrader davantage, et plus de 990 000 personnes pourraient se retrouver en situation de crise ou d’urgence alimentaire. En 2018, la période de soudure sera longue et difficile pour les communautés les plus pauvres, qui nécessitent d’une aide immédiate. Depuis 2015, avec le soutien de la Direction générale pour la protection civile et les opérations d’aide humanitaire européennes de la Commission européenne (ECHO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), ACTED aide les familles les plus vulnérables à traverser la période de soudure grâce à des distributions d’argent et d’intrants nutritionnels dans les départements du Wayi (région du Lac Tchad) et du Batha Est (région du Batha). Cette année, quelque 57 000 personnes ont reçu le soutien d’ACTED dans ces zones. Les distributions s’accompagnent de sessions d’information et de conseils quant à leurs dépenses pour lutter efficacement contre l’insécurité alimentaire et la malnutrition. Cette stratégie porte ses fruits : l’année dernière, l’argent distribué a permis de couvrir les besoins alimentaires de plus de 9 ménages sur 10. Ces distributions bénéficient à des populations particulièrement vulnérables, d’autant plus qu’elles sont souvent isolées lors de la saison des pluies. Quand les 4×4 ne parviennent plus à accéder à ces zones enclavées, les équipes recourent à des radeaux soutenus par des chambres à air pour traverser rivières et zones inondées et accéder aux villages pour assurer les distributions.

Soutenir durablement le renforcement de la résilience

Cette aide d’urgence saisonnière est nécessaire : elle permet aux communautés vulnérables de traverser la période de soudure sans mettre en péril leurs moyens d’existence, mais elle n’est pas suffisante. La situation alimentaire et nutritionnelle des communautés de la bande sahélienne s’est dégradée entre novembre 2017 et mai 2018, si bien qu’elles ne sont plus en mesure de subvenir à leurs besoins de base, et ce même en dehors de la période de soudure agricole, à cause de la pauvreté, du manque d’investissement dans les structures de production, mais aussi de la fréquence des catastrophes naturelles et la dégradation de l’environnement.

ACTED met donc parallèlement en œuvre des activités de renforcement de la résilience aux catastrophes, notamment en appuyant les systèmes communautaires d’alerte précoce et de réponse aux urgences afin de prévenir les risques futurs dans les zones exposées. Par ailleurs, l’intervention d’ACTED vise à renforcer la sécurité alimentaire et les moyens d’existence par l’augmentation de la production agricole. Avec le soutien de l’Ambassade de France au Tchad, ACTED va  soutenir des groupements maraîchers dans le département du Wayi. 750 personnes seront appuyées pour s’organiser en groupements productifs, recevront des semences adaptées, du matériel, mais aussi des formations aux techniques agricoles innovantes et luttant contre la dégradation environnementale. Les légumes récoltés contribueront directement à la consommation des ménages (soit plus de 5200 personnes), et leur vente sur les marchés locaux leur fourniront un revenu complémentaire.

ACTED met également en œuvre un projet d’assistance alimentaire pour les populations déplacées dans le département du Fouli, dans la région du Lac Tchad. Les populations déplacées à cause des violences de Boko Haram ont fui en laissant tout derrière elles, et sont particulièrement vulnérables à l’insécurité alimentaire. Aujourd’hui, plus de 140 000 personnes sont en situation de déplacement dans la région du Lac Tchad, à l’intérieur des frontières tchadiennes. Installées dans des villages d’accueil ou des sites informels, ces familles ont des besoins alimentaires et nutritionnels immédiats. Avec le soutien du PAM, ACTED distribue des vivres et des intrants nutritionnels à près de 35 000 personnes déplacées et dépiste et réfère les enfants atteints de malnutrition.

ACTED participe actuellement à l’analyse de la situation humanitaire au Tchad au côté des agences des Nations Unies et des autres partenaires. Cette analyse doit permettre de définir les priorités pour 2019. La situation alimentaire et nutritionnelle reste l’une des crises majeures à travers le pays et ACTED maintient son plaidoyer pour la prise en compte du nexus humanitaire-développement dans la réponse à la crise.

Tchad, crise alimentaire
ACTED
ACTED met en œuvre des activités de renforcement de la résilience aux catastrophes.
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ACTED met en œuvre des activités de renforcement de la résilience aux catastrophes.
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