Acted Global Communiqué

Un soutien urgent est nécessaire pour les foyers pastoraux et agro-pastoraux touchés par la crise du criquet pèlerin lors de la pandémie COVID-19

Une déclaration de la Regional Desert Locust Alliance

Nairobi, le 16 juillet 2020

L’émergence de nouvelles générations de criquets pèlerins s’accompagne de risques et d’impacts significatifs pour les pâturages qui convergeront avec l’impact économique actuel de COVID-19, menaçant davantage la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des communautés pastorales et agro-pastorales vulnérables dans toute la Corne de l’Afrique. Ces foyers déjà vulnérables sont désormais frappés par un triple choc : COVID-19, criquets pèlerins et risque d’une épidémie de Fièvre de la Vallée du Rift (FVR). Les conditions climatiques et écologiques ont créé un environnement favorable à la croissance et à la consommation de pâturages et de cultures pour les criquets pèlerins. En réponse à cette situation, les éleveurs ont commencé à se déplacer vers des pâturages non traditionnels pour trouver un terrain adapté aux besoins de leur bétail. La perte de broussailles et de pâturages ainsi que les déplacements irréguliers peuvent conduire à des conflits liés aux ressources, ou les éleveurs peuvent ne pas pouvoir accéder aux pâturages dont leurs troupeaux ont besoin. L’IGAD et la FAO ont également mis en garde contre une éventuelle épidémie de FVR – une maladie qui touche à la fois le bétail et les humains.

De surcroît, le COVID-19 a eu un impact négatif sur les populations pastorales et agro-pastorales en raison des restrictions de déplacements et couvre-feux qui ont limité l’accès aux pâturages. La convergence de ce triple choc représente un risque élevé pour la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance, et en particulier pour le bien-être des femmes et des filles. La baisse de la production de viande et de lait entraîne de mauvaises options alimentaires, un accès à la nourriture limité pour les éleveurs et leurs familles et un revenu de vente plus faible, ce qui réduit les ressources disponibles pour les biens et services ménagers nécessaires. Les crises aggravées exercent également une pression sans précédent sur les femmes, notamment sur leurs droits et leur sécurité alimentaire. Alors que les hommes partent à la recherche de pâturages, les femmes sont laissées à la seule responsabilité de s’occuper des enfants et de nourrir la famille. En outre, les perturbations attendues du marché, les chocs alimentaires, la pression sur les ressources en terre et en eau et l’augmentation de la malnutrition seront particulièrement difficiles pour les femmes, qui sont souvent les dernières à manger.

Un soutien urgent est nécessaire pour compléter les efforts déjà en cours des ONG, des gouvernements et des agences des Nations Unies, autrement la crise du criquet pèlerin entraînera une vulnérabilité accrue des communautés d’éleveurs et d’agropasteurs dans toute la Corne de l’Afrique.

La pire invasion de criquets pèlerins depuis 70 ans menace de décimer les pâturages et les cultures dans la Corne de l’Afrique et potentiellement au Sahel. Il existe un risque d’épidémie de Fièvre de la Vallée du Rift qui menace encore plus le bétail et la santé humaine. Outre ses effets directs sur la santé, le COVID-19 perturbe déjà les marchés, fait monter les prix des denrées alimentaires, restreint les petites entreprises et limite le commerce du bétail. Le conflit en cours limite encore plus le commerce et l’accès humanitaire dans certaines régions, notamment dans le sud de la Somalie. La réponse humanitaire est actuellement inadéquate. Agir maintenant permettrait de sauver des vies et serait moins coûteux que de répondre à ce qui pourrait devenir une famine. – Allison Huggins, directrice régionale adjointe de Mercy Corps – Afrique

La RDLA recommande des réponses adaptées et sensibles au marché pour répondre aux divers besoins des communautés pastorales et agro-pastorales touchées. Les réponses doivent être conçues sur la base d’évaluations qui tiennent compte non seulement des besoins des communautés pastorales et agropastorales, y compris l’identification de la manière dont les hommes et les femmes ont été directement touchés, mais aussi des évaluations du marché pour s’assurer que les actions n’ont pas d’impact négatif sur les marchés fragiles existants.

La RDLA plaide en faveur d’un soutien aux communautés pastorales par :

  • la protection de la production par la distribution d’aliments complémentaires pour animaux ainsi que par des interventions sanitaires pour le bétail conformément au Livestock Emergency Guidelines and Standards (LEGS)
  • le renforcement des marchés par le soutien aux commerçants et l’augmentation des transferts d’argent liquide aux ménages afin de renforcer le pouvoir d’achat
  • garantir l’accès à des aliments nutritifs pour les éleveurs et les agro-pasteurs les plus vulnérables
  • accroître la capacité de préparation pour prévenir les frictions entre groupes sur des ressources limitées.

Les acteurs devraient travailler en partenariat étroit avec les gouvernements locaux dans leur réponse et s’engager avec les groupes de sécurité alimentaire et de moyens de subsistance au niveau national et/ou les secteurs de l’agriculture et de l’élevage pour mettre en place un système alimentaire plus efficace et plus inclusif. En fin de compte, il est essentiel de veiller à ce que les réponses soient axées sur les besoins, sur l’égalité des sexes, sur les faits, sur les résultats et sur le marché afin d’atténuer l’impact de la crise sur les ménages pastoraux et agropastoraux et sur les systèmes plus larges dans lesquels ils opèrent.

Le temps est venu de soutenir les pasteurs et les agropasteurs dans les zones touchées par les criquets, potentiellement jusqu’aux prochaines pluies qui sont prévues en octobre/novembre. L’état physique du bétail doit être maintenu pour que les ménages puissent produire du lait, ce qui les protégera – en particulier les enfants – contre la malnutrition pendant la prochaine saison sèche. La perte de gains économiques peut également mettre en péril l’autonomisation et les rôles décisionnels que les femmes ont pu revendiquer pour elles-mêmes jusqu’à présent. Un soutien est nécessaire sous la forme d’une assistance directe aux ménages touchés, mais aussi à des questions systémiques plus larges, telles que la facilitation du commerce du bétail, la politique des autorités locales, la production de fourrage, les systèmes de distribution et de stockage ; l’extension des produits et services vétérinaires fiables et de qualité, abordables aux zones reculées ; le maintien et l’extension des systèmes d’alerte précoce contre les criquets (et autres dangers) ; la possibilité pour les éleveurs et les agropasteurs de communiquer et de se tenir au courant des changements de contexte, des prévisions météorologiques, des mesures d’atténuation COVID-19, etc. Ce travail prendra du temps et impliquera nécessairement les secteurs public et privé ainsi que les communautés humanitaires et de développement.

Pour plus d’information, merci de contacter :

  • Francesca Sangiorgi / Coordinateur RDLA ACTED, francesca.sangiorgi@acted.org
  • Martin Mamsaka / Conseiller régional pour les médias et la communication OXFAM, martin.namasaka@oxfam.org
  • Jeremy Taylor / Conseiller régional en plaidoyer NRC, jeremy.taylor@nrc.no

Note aux éditeurs :

La Regional Desert Locust Alliance rassemble plus de 60 ONG nationales et internationales qui répondent à la crise du criquet pèlerin dans la Corne de l’Afrique. L’Alliance a été créée en février 2020 en réponse à la menace croissante que représentent les criquets pèlerins pour la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance dans neuf pays de la grande Corne de l’Afrique : Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Kenya, Somalie, Sud-Soudan, Soudan, Ouganda et République-Unie de Tanzanie.

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