République Démocratique du Congo Article

Immersion à Yakoma: être humanitaire dans une zone d’accueil de réfugiés

Situé à l’extrême Nord-Est de l’Equateur, dans la province du Nord Ubangi, le territoire de Yakoma est considéré comme une zone d’accueil pour les réfugiés et les déplacés provenant des régions ou pays limitrophes. Il doit ceci à sa situation géographique et sécuritaire. Présente depuis plus de 15 ans en République démocratique du Congo, ACTED assure l’assistance et la protection des personnes vulnérables (réfugiés et communautés hôtes) au sein du territoire de Yakoma.

Au Nord de la République démocratique du Congo, Yakoma est délimité par les rivières Uélé et Ubangi, qui longent la frontière avec la République Centrafricaine d’où proviennent des milliers des réfugiés.

92 000 réfugiés sont déjà arrivés depuis la République centrafricaine (RCA) après l’éruption des violences liées aux élections en décembre 2020.

UNHCR

Au niveau sécuritaire, le territoire est relativement calme, en dépit de quelques troubles liés aux conflits de terre. Les plus importants conflits de terre enregistrés dans la zone, remontent à 2014 opposants les villages de Bainga et Gbagba, en ceux de Gbagba et Sanga, ou encore ceux de Ngunde et Ngazamba, tous situés dans le secteur de Yakoma.

Depuis le début de l’année 2021, ACTED, soutenue par le Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés (UNHCR), œuvre dans le camp et le site d’opportunité de Modale situé à 35 kilomètres de Yakoma, dans le cadre de son projet d’assistance en eau, hygiène et assainissement aux réfugiés centrafricains au Nord-Ubangi.

Répondre efficacement aux besoins des plus vulnérables

Avec l’accord des autorités provinciales, le HCR a construit le site de Modale d’une capacité d’accueil de 10 000 personnes, pour y installer les réfugiés centrafricains fuyant les atrocités qui se produisent dans la sous-préfecture de Bema en RCA. Fraichement mis en place, une autorisation du chef de groupement de Modale est requise avant l’installation des réfugiés dans le camp. Afin de réaliser une intervention efficace et connue de tous, ACTED s’est entretenu avec le chef du groupement de Yakoma et a réalisé des sensibilisations auprès de la communauté hôte.

L’écart entre les attentes et les réalités d’une intervention humanitaire est souvent remarquable. Les contraintes et la pression rythment le quotidien des équipes terrain. Au cours d’une interview, l’un des chefs de projet et staff ACTED à Yakoma, explique les obstacles rencontrés et surmontés lors de sa mission.

« Depuis le début de l’année 2021, nous avons eu pour mission d’assister les personnes vulnérables en eau, hygiène et assainissement. Cela fait 6 ans maintenant que j’aide à soutenir les réfugiés et j’avoue que chaque expérience est particulière. Le 21 avril 2021, le site de Modale a accueilli son premier convoi de réfugiés : 29 familles soit 129 personnes. Présent dans la zone pour conduire fidèlement l’assistance d’ACTED auprès des réfugiés, nous avons rencontré quelques contraintes importantes pour répondre en urgence au premier besoin identifié : l’accès à l’eau potable.

humanitaire en République démocratique du Congo
Mission d'évaluation des besoins WASH et diagnostic technique à Kanzawi-Nzongbo-BU

Le site de Modale était avant une brousse inexploitée, dit-il. Avec les partenaires en eau, assainissement et hygiène, nous avions connu beaucoup de difficultés à fournir un accès à l’eau aux premiers arrivés sur le site, suite à la découverte d’une couche rocheuse située à 18 mètres de profondeur. Cette couche ne nous a pas facilité la tâche pendant le forage. Certains de nos outils comme les marteaux et les tiges (tubes de forage), se sont retrouvés coincés au sol à cause de la profondeur. L’alternative décidée en urgence pour fournir l’eau aux réfugiés était de mettre à disposition un camion d’eau. Sachant que cette alternative n’était pas prévue en amont, la pression a saisi la coordination et les partenaires qui ont tout de même su persévérer afin de résoudre cette contrainte. »

 

Les enjeux des travailleurs humanitaires sur le terrain

« Ces obstacles concernant mon travail, résument la réalité du travail d’un humanitaire. Nous sommes régulièrement soumis au défis d’assurer avant tout et efficacement le bien-être des personnes que nous soutenons.

Travailler au service des autres m’a permis de m’adapter à tous types de situations, à supporter et gérer le stress produit par l’urgence. Etant chargé de projet et guide des activités, je me dois de communiquer à mes équipes terrain le caractère humanitaire requis pour fournir un travail durable en faveur des personnes sur place.

Humanitaire en République démocratique du Congo

En plus des défis professionnels vécus au quotidien, il est assez difficile de faire une réelle séparation entre la vie privée de la vie d’humanitaire. En tant qu’acteur humanitaire, logeant et travaillant dans la zone d’intervention, la communauté aidée a toujours tendance à confondre les temps d’assistance et de repos. Il suffit de rencontrer un bénéficiaire dans la rue en dehors des heures de service pour qu’il adresse ses besoins directement ou indirectement.»

Plus que la présence permanente des bénéficiaires dans la vie des humanitaires, ces derniers rencontrent des moments de stress et de solitude liés à la distance avec leurs familles, leurs amis et leur confort, mais également des inquiétudes liées à l’insécurité du lieu dans lequel ils se trouvent et aux infrastructures pas toujours en bon état. Ce mode de vie est encore plus compliqué pour ceux se trouvant dans des zones d’interventions moins sécurisées et isolées.

Dans le Nord Ubangi en général, la situation sécuritaire pour les humanitaires est relativement calme, malgré la situation politique suite à la démission du gouverneur Izato Nzege en décembre 2021. Au-delà du stress et de la solitude, l’assistance humanitaire a aussi des effets positifs sur les humanitaires. Cette assistance contribue à sauver des vies, à soulager la souffrance, à améliorer la santé, à maintenir des structures médicales, à réhabiliter l’assise économique des victimes, et aussi à restaurer leur dignité. Un sentiment de joie et de satisfaction qui émerge du cœur des humanitaires. Dans le cadre de l’intervention à Yakoma, au Nord Ubangi, ACTED a soutenu plus de 9 843 réfugiés sur la restructuration des installations sanitaires et sur l’accèes à l’eau, à l’hygiène et à l’assainissement.

ACTED, dans ses interventions, accompagne son staff et assure son bien-être, car les travailleurs humanitaires qui se dévouent pour aider les autres méritent à leur tour d’être considérés avec le plus de sécurité possible. Avec l’appui de ses différents partenaires financiers, ACTED répond également aux besoins des populations en danger, se trouvant dans les zones de conflits armés.