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Journée Internationale des Droits des Femmes 2022 : Comment soutenir les femmes et les filles déplacées

L'expérience des femmes et des filles déplacées tranche avec celle des garçons et des hommes. Si les femmes déplacées à l'intérieur de leur propre pays ont déjà du mal à accéder aux services de base, elle sont en plus confrontées aux violences sexuelles et sexistes et sont souvent exclues des processus de décision de la communauté.

En République Démocratique du Congo, en Somalie et en Irak, trois pays accueillant un large nombre de personnes déplacées, ACTED s'engage à soutenir les femmes dans les défis spécifiques auxquels elles font face, avec le soutien de l'Union Européenne.

Les violences sexuelles et sexistes, ultra-présentes en contexte de déplacement

En RDC, où 5,6 millions de personnes sont actuellement déplacées à l’intérieur du pays, la violence sexuelle est quasi systématiquement utilisée par les groupes armés, rendant les femmes et les filles particulièrement vulnérables. En contexte de fuite, sans maison, les femmes ne peuvent emporter avec elle l’intimité offerte par un « chez soi ». C’est également le cas en Irak et en Somalie, où la plupart des personnes déplacées vivent dans des sites informels où les installations sanitaires sont parfois dépourvues de serrures, de portes ou de fenêtres : les femmes y sont ainsi bien plus exposées à la violence, et bien moins en sécurité.

Femmes déplacées somaliennes construisant des "buuls", abris traditionnels somaliens construits à partir de plastique et de tissus recyclés autour de structures en bois et en tôle

Construire des « espaces de confiance »

Améliorer et adapter les sites en continu est crucial pour protéger au mieux les femmes déplacées. ACTED et ECHO évaluent continuellement les besoins dans les camps où ils travaillent en menant des audits de sécurité pour évaluer les risques de violence sexiste. L’objectif est de minimiser les risques en créant un environnement plus sûr. En Somalie, après qu’un audit ait montré que les sites ciblés manquaient de lumière, ACTED a installé des lampadaires solaires près des lieux d’intérêts généraux.

Les femmes et les filles ont également besoin d’espaces qui leur sont dédiés, et où elles peuvent s’exprimer librement. La mise en place de tels espaces est l’une des principales réponses apportées par ACTED et l’UE pour que les femmes se sentent en sécurité dans les sites. Ainsi, ACTED a soutenu la création de plusieurs « espaces de confiance » à Nyunzu, en RDC, et a participé à l’organisation de session de sensibilisation, notamment par le biais du théâtre participatif dans le centre ville. Nous avons également pu identifier des points focaux locaux pour suivre les sujets spécifiques aux femmes. Sur les sites ciblés en Irak, ACTED a mis en place un système de référence avec des organisations de protection tout en essayant d’inclure des organisations locales pour assurer la continuité de l’activité.

Théâtre participatif en vue de la sensibilisation sur les violences sexuelles et sexistes à Nyunzu, RDC

Les femmes trop peu représentées dans les comités locaux

Alors que les femmes souffrent davantage de violences, les avancées communautaires sur le thème des violences basées sur le genre sont moindre puisque les membres des comités locaux sont la plupart du temps une majorité d’hommes. De ce fait, elles ne sont pas assez impliquées dans les prises de décision qui concernent la communauté. En Somalie, ACTED cherche à s’assurer que les femmes sont bien représentées dans les Comités de Gestion Communautaire (CMC) afin que leurs voix soient entendues. Ainsi, chaque CMC de 5 membres dans lequel ACTED est impliquée doit comprendre au moins 2 femmes. Dans la province du Tanganyika (RDC), les femmes sont également souvent exclues des décisions communautaires pour des raisons culturelles, car généralement considérées comme inférieures aux hommes.

Les femmes souffrent aussi d'exclusion sociale et économique

De manière plus globale, les femmes sont confrontées à un isolement social et économique, exacerbé par les contextes de déplacement, qui les coupent souvent des services de base. Doutant de la disponibilité et de la qualité des services des centres publics, les femmes déplacées en Irak, par exemple, n’ont pas les moyens de se payer des soins privés ou spécialisés comme les soins gynécologiques. Il en va de même pour l’éducation, qui est gratuite dans les écoles publiques irakiennes mais qui exige des investissements financiers pour le transport et le matériel.

Françoise est référente "protection" dans sa communauté. Ici, elle dirige des séances de sensibilisation aux inégalités de genres dans son quartier.

Les femmes cheffes de famille encore plus en difficulté

Souffrant déjà d’une situation économique plus difficile en dehors des camps, les femmes irakiennes déplacées ont généralement des compétences professionnelles limitées et ont du mal à s’insérer dans la vie active. Le défi est encore plus grand pour les femmes cheffes de famille, qui doivent subvenir aux besoins familiaux de base et s’occuper de leurs enfants. En Somalie, où de telles luttes existent également, ACTED et ECHO soutiennent les ménages vulnérables et en situation d’insécurité alimentaire par des transferts d’argent liquide afin de leur assurer l’accès à des conditions de vie et des moyens de subsistance dignes. 80 % des ménages soutenus sont dirigés par des femmes.

 

Les femmes et les filles représentent la moitié des personnes déplacées dans le monde et leurs conditions de vie sont rendues plus difficiles dans les contextes de déplacement. Elles ont donc besoin d’un soutien supplémentaire et très spécifique : ACTED et ECHO poursuivent leurs efforts quotidiens pour qu’elles puissent vivre dans la dignité, pour elles-mêmes et pour la vie de la communauté dans son ensemble, grâce à un programme innovant de partenariat programmatique de 3 ans.

 

 

Crédits photos : Gwenn Dubourthoumieu