Jordanie Acted

Jordanie: faire pousser une forêt dans le désert

La Jordanie, où le climat est sec la majeure partie de l'année, est fortement touchée par le changement climatique, qui exacerbe la pénurie d'eau et la désertification. Pour contrer cet impact, 50 Jordaniens et réfugiés syriens vulnérables sont employés par Acted pour travailler sur le paysage aride du gouvernorat de Karak. Ainsi, l'équivalent de 700 hectares de terres sont entretenus afin d'accroître la régénération forestière dans la réserve de Jothur, notamment par la plantation de 132 000 arbres forestiers.

Plus de dix ans après le début de la crise syrienne, les réfugiés syriens enregistrés en Jordanie sont toujours confrontés à des difficultés d’intégration. Ils luttent par exemple toujours pour accéder à l’emploi. Environ 64 % d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté (HCR, 2022) et ont du mal à accéder à des emplois formels, ce qui les empêche de s’intégrer dans la société jordanienne et de satisfaire leurs besoins fondamentaux. D’autre part, le marché du travail jordanien, déjà fragile, reste fortement touché par la pandémie de Covid, avec un taux de chômage de près de 24 % en 2022 (Banque mondiale). Le manque d’opportunités d’emploi affecte à son tour l’accès aux besoins de base, avec 14% de la population jordanienne vivant sous le seuil de pauvreté cette même année. Ces défis sont encore plus importants pour les jeunes, qui sont confrontés à un taux de chômage proche de 50 %, ce qui entrave la croissance économique de la Jordanie et le développement d’opportunités qui permettraient à la prochaine génération de sortir de la pauvreté.

Yousef* est un Jordanien de 21 ans, et Hassan* est un réfugié syrien de 20 ans. Ils travaillent ensemble dans le cadre du programme de foresterie durable d’Acted à Karak, qui lutte directement contre la désertification de la région, réduit la dégradation des sols et améliore les conditions de vie des Jordaniens vulnérables et des réfugiés syriens dans le gouvernorat. Ce projet a débuté en septembre 2022 et se poursuivra jusqu’en mai 2024, grâce au financement de la GIZ.

7000 ha
de terres sont régénérées et entretenues dans la réserve de Jothur, gouvernorat de Karak
132 000
arbres sont plantés dans la réserve de Jothur
Yousef, réserve de Jothur, novembre 2023

Créer des opportunités de revenus et nouer des relations

Yousef travaillait comme journalier dans le secteur agricole. Ses revenus étaient incertains et il avait du mal à gagner sa vie de manière stable grâce à cette activité. En Jordanie, les journaliers sont particulièrement vulnérables, car ils travaillent dans des conditions difficiles pour de faibles salaires et n’ont aucune sécurité d’emploi, ce qui les empêche de mettre de l’argent de côté ou de faire des projets pour l’avenir. Yousef a découvert le projet alors qu’il avait déjà commencé, mais il pouvait encore être interviewé avant la fin du processus d’embauche. Il a vu dans ce programme une opportunité d’avoir un revenu fiable et des conditions de travail décentes, lui permettant de gagner sa vie et d’économiser de l’argent. Lors de discussions avec les équipes du programme, Yousef a volontiers indiqué que le projet lui avait permis de nouer des relations fructueuses avec des collègues jordaniens et syriens. Il a expliqué que cela représentait pour lui une motivation supplémentaire pour venir travailler tous les jours. À plus grande échelle, cette cohésion contribue à renforcer la cohésion sociale entre les communautés syriennes et jordaniennes de la région.

Une nouvelle vie en Jordanie

Hassan n’a que 20 ans, mais il a déjà relevé de nombreux défis. Il a fui la Syrie en raison du conflit et a terminé ses études en Jordanie, où il a obtenu son certificat Al-Tawjihi (l’examen du certificat général d’enseignement secondaire en Jordanie et en Palestine, qui donne accès aux universités). Hassan a toujours rêvé de devenir journaliste, mais il n’avait pas les moyens financiers de s’inscrire à l’université après l’obtention de son diplôme. Il a donc postulé pour la bourse Albert Einstein German Academic Refugee Initiative offerte par le HCR aux réfugiés souhaitant poursuivre des études supérieures.

Malheureusement, Hassan n’a pas fait partie des 25 étudiants sélectionnés pour cette bourse. Pourtant, Hassan s’est accroché à son rêve et a décidé de travailler jusqu’à ce qu’il puisse réunir suffisamment d’argent pour terminer ses études au département de journalisme et de communication de masse. C’est pourquoi, lorsqu’il a reçu un lien vers l’offre d’emploi d’Acted pour ce projet de reboisement, il a décidé de postuler, même s’il avait déjà un travail de nuit. Les travaux consistent à planter des arbres et des arbustes dans la réserve, à élaguer, à friser les arbres, à entretenir les systèmes d’irrigation, à enlever les dépôts de plantes et à installer des clôtures, pour un maximum de 60 jours de travail par travailleur. Grâce à ces deux emplois et à sa forte détermination, Hassan a réuni suffisamment d’argent pour pouvoir s’inscrire à l’université pour l’année à venir.

Travailler sur ce projet me permet de continuer mes études.

Hassan

Hassan, récolte des olives sur les arbres plantés dans la réserve de Jothur, novembre 2023

Travailler pour survivre, et pour contribuer à un projet à impact

Yousef et Hassan ont tous deux rejoint le projet pour des raisons économiques, car il leur permet d’améliorer durablement leurs conditions de vie. Cependant, leur motivation à s’engager va bien au-delà. Tous deux expliquent qu’ils sont fiers de participer à une action qui aura des effets à long terme sur le territoire et le paysage de Karak. En effet, alors que 90% de la Jordanie est déjà considérée comme une zone aride (ministère de l’environnement, UICN et FEM, 2020), la situation ne cesse de se détériorer en raison du changement climatique, de l’approvisionnement limité en eau et de la pression démographique, ce qui entraîne une augmentation de la déforestation et de la dégradation des sols. Ces phénomènes ont à leur tour un impact négatif sur la santé et la sécurité alimentaire des communautés voisines, et nuisent à leurs conditions de vie et à leurs capacités agricoles.

Ce projet m'a aidé à développer mes connaissances et expériences des pratiques agricoles basées sur des preuves scientifiques. J'espère que nous pourrons étendre ce projet à tous les gouvernats.

Hassan

Hassan, Yousef et d'autres travailleurs entretiennent les arbres plantés dans la réserve de Jothur, novembre 2023

Les arbres plantés sont un mélange de forêts indigènes et d’arbres productifs choisis en fonction des spécificités du sol. En outre, des techniques adaptées au climat, telles que la collecte naturelle des eaux de pluie, sont utilisées pour assurer la durabilité du projet et le développement à long terme des arbres plantés. Yousef et Hassan ont tous deux déclaré attendre avec impatience les résultats à long terme du projet, car ils ont pu constater que les arbres, bien que petits, ont déjà transformé le paysage désertique de la région en collines verdoyantes, où Hassan prédit que les familles et les touristes viendront bientôt pour admirer le magnifique paysage.

Par un acte aussi simple que la plantation d’arbres, Yousef et Hassan ont développé des compétences, des amitiés et des revenus, tout en participant à l’amélioration des conditions de vie des communautés vivant autour de la réserve de Jothur, dans le gouvernorat de Karak. Tous deux peuvent désormais envisager l’avenir avec plus de sérénité, car leur participation active au projet leur apporte une certaine stabilité et les aide à être plus employables à l’avenir.

*les noms ont été modifiés pour protéger l’identité des personnes.