Les absences successives de pluie à travers une grande partie de la Somalie, accompagnées par la chute des revenus, la hausse des prix des denrées alimentaires et la persistance des problèmes d'accès résultant du conflit et de l'insécurité, ont épuisé les stratégies d'adaptation des familles vulnérables. Le nombre de personnes confrontées à l'insécurité alimentaire (IPC Phases 3 et 4) a augmenté de façon spectaculaire et devrait atteindre près de 3 millions entre maintenant et juin. 944 450 enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition aiguë, dont 185 120 de malnutrition aigue sévère. Plus de la moitié de la population du pays a besoin d'assistance. Le coordinateur humanitaire de l'ONU a déjà reçu des preuves concernant des décès dus à la sécheresse.
Les femmes et les filles portent le plus lourd fardeau dans cette crise : responsable des enfants, d’aller chercher l’eau dans des endroits de plus en plus éloignés et de faire des compromis pour que leurs familles puissent accéder aux denrées alimentaires. Les enfants sont particulièrement vulnérables non seulement à la mauvaise nutrition, mais aussi à la violence physique et sexuelle, avec les garçons menacés de recrutement par des acteurs armés non étatiques et les filles menacées par le mariage précoce et le mariage des enfants. Trois millions d’enfants en âge d’être à l’école ne sont pas scolarisés.
L’impact humanitaire s’étend aux pays voisins et les déplacements transfrontaliers sont en hausse. Près de 100 Somaliens arrivent chaque jour en Ethiopie, dont beaucoup d’enfants et avec des taux alarmants de malnutrition. L’Ethiopie accueille déjà environ 244 000 réfugiés somaliens enregistrés et est elle-même gravement touchée par la sécheresse, tout comme une partie du Kenya, où les inquiétudes augmentent (comme en 2011) concernant le grand nombre de Somaliens qui se dirigeront vers Dadaab malgré la fermeture planifié du camp par le Kenya. La coordination régionale est vitale et les principes du rapatriement librement consenti établis par l’Accord Tripartite de 2013 doivent être défendus et intégrés dans un nouvel accord.
En 2010-11, des défaillances systémiques du côté de la communauté internationale ont conduit à une famine en Somalie où près de 260 000 personnes sont mortes, la moitié d’entre elles étant des enfants. Le monde entier avait alors promis : «plus jamais». Nous avons déjà manqué l’opportunité de mener une action anticipée. L’opportunité qui permettrait d’éviter une famine disparait tout aussi rapidement. Si nous ne voulons pas que l’histoire se répète, nous ne pouvons plus retarder l’action.
La France n’a pas contribué depuis 2014 à la réponse humanitaire en Somalie : ces contributions doivent reprendre. De même, nous vous invitons à encourager les autres pays donateurs à accroître leurs engagements. Compte tenu de l’ampleur des besoins vitaux, nous vous exhortons vivement à:
Par le biais de nos nombreuses organisations membres et de nos partenaires, nous faisons notre maximum pour répondre aux besoins des personnes touchées, y compris via la livraison d’eau par camion-citerne, des activités de sécurité alimentaire et le traitement de la malnutrition aiguë et sévère. Cependant, la communauté internationale n’a pas encore saisi l’urgence d’une situation qui se dégrade rapidement. Les prévisions suggèrent que les pluies d’avril-juin de cette année devraient également être inférieures à la normale, tout comme elles l’étaient en 2011, lorsque les décès liés à la sécheresse ont fortement augmenté entre avril et mai.
Les sécheresses dans la Corne de l’Afrique sont des événements récurrents et, pour briser le cycle, nous devons redoubler d’efforts afin de renforcer la résilience dans la région. Nous apprécions les ressources déjà allouées à cet égard par la communauté internationale dans le passé. Cependant, la force des récents chocs climatiques a conduit à une crise d’une telle envergure et d’une telle urgence qu’une réponse immédiate et globale de la communauté internationale est fondamentale, en soutien aux efforts menés à l’échelle nationale, pour prévenir la famine.
Le temps presse : nous devons agir maintenant et collectivement pour éviter que cette crise ne devienne une catastrophe.