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Au Tchad, les femmes actrices de la lutte contre l’insécurité alimentaire

En 2018, les populations des régions du Lac Tchad et du Batha ont été touchées par une crise alimentaire sévère. Durant la période de soudure agricole, ACTED a soutenu les plus vulnérables avec des distributions de liquidités et de compléments nutritionnels, et a mis en place des activités de maraîchage en groupement pour renforcer la résilience des populations touchées.

8200
familles soutenues pendant la période de soudure dans les régions du Batha et du Lac Tchad

Mariam, 34 ans, témoigne de l’impact de la crise du Lac Tchad sur sa famille. Jusqu’à récemment, les revenus de son mari, pêcheur sur le lac Tchad, permettaient à la famille de subvenir à ses besoins. L’insécurité régnante sur les berges du lac l’a contraint à cesser son activité : revenu au village de Bari Dina, il a du mal à retrouver du travail, et le couple peine à nourrir ses sept enfants, dont le plus jeune a à peine 18 mois.

La famille a bénéficié de l’appui d’ACTED pour passer la période de soudure : ils ont reçu la somme de 27 000 FCFA (environ 40€) ainsi que des compléments nutritionnels sur une base mensuelle, entre juin et septembre 2018. Au total, 5900 personnes ont bénéficié de cette aide  pour subvenir à leurs besoins alimentaires, grâce au soutien de la Direction générale de la protection civile et des opérations d’aide humanitaire européennes (ECHO) de la Commission européenne et du Programme alimentaire mondial (PAM).

Pour sa part, Mariam a utilisé l’argent qu’elle a reçu pour acheter du maïs.

Contrer la malnutrition

Dans le village de Didjamba, les équipes d’ACTED ont rencontré Sadia, mère d’une petite fille de 10 mois atteinte de malnutrition. Didjamba est pourtant loin des centres de santé, et les soins nécessaires n’y sont pas toujours disponibles. Sadia n’a pas les moyens de l’y emmener, ni la certitude d’y trouver les soins nécessaires. Grâce à l’appui d’ACTED, Sadia a pu recevoir des intrants nutritionnels pour sa fille. Elle a également suivi des sessions d’information aux meilleures pratiques alimentaires et d’hygiène pour aider sa fille à se rétablir. Aujourd’hui, la petite est en bonne santé.

Sadia n’est pourtant pas rassurée : malgré tous ses efforts pour cultiver son champ, elle craint que sa récolte ne soit mauvaise. Quant à son mari, il devra peut-être quitter Didjamba pour chercher du travail en ville…

2300
familles bénéficiaires de distributions de liquidités et de compléments nutritionnels dans le Batha Est

Des groupements maraîchers pour renforcer la résilience des familles

Dans le département du Wayi, l’herbe a déjà jauni et l’harmattan commence à souffler, recouvrant l’horizon d’un voile poussiéreux. Quelques tiges de maïs dépassent çà et là sur les champs depuis la dernière récolte.

Dans le village de Bari Dina, où vit Mariam, ACTED a créé un groupement maraîcher de 25 personnes – des femmes et des hommes volontaires qui avaient bénéficié de l’assistance saisonnière – avec le soutien de l’Ambassade de France au Tchad. Les membres du groupement ont participé à des formations et ont été doté en matériel et en intrants nécessaires au lancement des activités agricoles.

Depuis un mois, chaque jour les membres du groupement se rendent à leur parcelle et s’adonnent à son nettoyage. L’accès à l’eau pose problème dans la région, et la parcelle n’est pas encore dotée de puits. Mais grâce à la bonne volonté d’un habitant du village, les membres du groupement ont déjà pu mettre en pépinière les premières semences données par ACTED sur une parcelle privée, et les arrosent grâce à un forage. Dans ce village, l’agriculture était déjà la principale activité, mais les habitants n’avaient pas l’habitude de travailler en groupement. Les hommes travaillaient surtout en tant que journaliers sur les parcelles d’autres propriétaires.

Aujourd’hui, le chef du village est très impliqué dans le groupement, et très enthousiaste.

Quand tu travailles seul, même si tu as les moyens, tu ne fais rien, mais si tu es en groupement, même si tu n’as rien, tu peux faire beaucoup

chef du village de Bari Dina

Avec la bonne volonté des habitants et l’appui d’ACTED, le chef de village espère éliminer la malnutrition dans son village.

30 autres villages reçoivent ce même soutien à la mise en œuvre d’activités de maraîchage communautaire. Les légumes produits serviront à nourrir les membres du groupement et leur famille, tandis que le surplus sera vendu sur les marchés.

Awa, force de la nature

Awa a le regard fier et déterminé. Elle est membre du groupement maraîcher de son village, Dibintchi. Awa est fille d’agriculteur, et, avec son mari, ils ont souvent travaillé dans les champs en tant que journaliers.

Ces expériences lui ont beaucoup appris : les techniques de maraîchage, les différentes semences, les méthodes d’irrigation, la mise en pépinière… Elle pourrait se débrouiller seule, mais n’en a pas les moyens. Ainsi, quand les équipes d’ACTED sont venues à Dibintchi pour proposer la création de groupements maraîchers, Awa a décidé de se porter volontaire. Depuis, aux côtés d’une vingtaine d’autres personnes, elle s’adonne tous les jours au nettoyage de leur parcelle.

Ils vont bientôt commencer à labourer et mettre en pépinière tomates, oignons, carottes, laitues et autres légumes grâce aux semences et outils fournis par ACTED.

ACTED Tchad - 2018
Awa, membre du groupement du village de Dibintchi est pleinement investie dans les activités de maraîchage

Une mère agricultrice

Lorsqu’Awa est au champ, c’est sa fille aînée qui, du haut de ses 12 ans, garde ses six frères et sœurs, dont le petit dernier de sept mois qu’Awa continue d’allaiter.

Entre juin et septembre, Awa a bénéficié de quatre distributions de liquidités et d’intrants nutritionnels.

Quelques mois auparavant, ACTED avait rendu visite à la famille dans le cadre d’activités de dépistage de la malnutrition – un des fils d’Awa, âgé de deux ans, souffrait de malnutrition.

Awa a participé aux sessions d’information et aux démonstrations culinaires organisées par ACTED, où elle a appris à préparer de la bouillie enrichie avec les intrants.

J’ai suivi tous les conseils et lui ai donné de la bouillie enrichie. Maintenant, il va mieux

Awa

Aujourd’hui, elle continue à préparer la bouillie enrichie grâce aux aliments qu’elle peut trouver localement, et en donne régulièrement à ses enfants. Avec les activités de maraîchage, elle espère pouvoir soutenir sa famille, et toute la communauté.

Les femmes du groupement veulent aller plus loin : elles aimeraient acquérir un moulin pour faire de la farine, et construire un grenier pour stocker les récoltes – des récoltes que toutes espèrent très bonnes.